Monday, August 10, 2009

hagiographie

C'était une jeune chrétienne de la noblesse et donc bien éduquée qui se présente à l'âge de 18 ans à l'empereur romain Maximin lequel se livrait comme ses prédécesseurs à son jeu favori, la persécution des chrétiens. Mais la future Sainte avait des couilles en or massif philosophale pierre ponce tout. Au Maxi minus elle fit un sermon en lui montrant la futilité de ce passe-temps qui en fait servait la cause des chrétiens trop contents d’être martyrisés et ainsi d’attirer l’attention des media avides de cirque & showbiz. Ce que la légende ne dit pas explicitement mais qu'on peut déduire de son lieu de naissance, à savoir Alexandrie, il y a de bonnes chances que Catherine ait été une sorte de marrane à des siècles d'avance. Son origine noble et égyptienne entre en contradiction flagrante avec la condition sociale brute des esclaves qui fournissaient la majorité des troupes de la nouvelle religion hégémonique utilisant des techniques de conditionnement des foules depuis modernisées et perfectionnées au benzène. Mais la singularité de cette figure unique dans l’histoire ne tient ni à la condition sociale ni même à une sorte d'idéalisme révolutionnaire qui serait ici singulièrement anachronique. Encore moins de féminisme mais lisons plutôt la suite : « Abasourdi et insulté par l'audace de la jeune femme, mais manquant des talents requis pour discuter de logique formelle avec elle, l’Empereur la fit enfermer dans les cachots de son palais ; puis il appela tous ses savants et tout ce qu'il avait pu rassembler de suppôts supposés savoir pour qu’elle soit convaincue d'apostasie à l’envers ou l’enfer de la foi chrétienne ; en la convainquant d’avoir commis une hérésie contre la religion romaine impériale, Maximin se donnait les moyens d’exécuter de manière légale une membre éminente de la classe noble. Tant que les esclaves abondaient pour boire à la lie la coulpe des chrétiens, il n'y avait pas vraiment grand danger pour Rome, mais si les élites commençaient à se tourner vers cette diable de religion apocalyptique, l'empire n’était plus seulement à s’empirer mais foutu ! Mais là je suppose que notre Empereur ne voyait pas si loin, donc j'ajoute le complément essentiel : cette sainte se disait mariée, non au Christ qui n’est qu’un homme, mais à une entité toujours dite au féminin, bien que dépourvue de toute effigie, à savoir Sophia en grec, celle dont les philosophes, c'est-à-dire les hommes dans tous les sens du mot, sont par principe et comme de naissance les amis inconditionnels, à la vie à la mort. Le tournant dans l'histoire, comme du lait qui tourne aigre, soit le christianisme devenu philosophique, soit grec dans un sens à préparer & justifier à l’avance la décomposition avancée du christianisme : disons que c'est là la première introduction de la déconstruction dans ce qui paraissait absolument aller de soi aussi dur qu'une pierre. Plutôt que Pierre qui a renié son maître — comme si ce n’était pas Judas qui lui avait mâché tout le sale boulot, — Paul, un vrai juif lui, avait vu le danger à l'avance et avait su nommer l'ennemi en parlant de la « folie du monde », par quoi il désignait précisément le contraire de ce qu’on a traduit malencontreusement par « sagesse » (comme s’il pouvait y avoir un contraire à la folie de la raison), en tout cas d’une femme qui incarne donc l’idéal des philosophes purs et durs : la Diotima du Banquet de l’Ermite de Grèce ou encore la Sophie du saut par-delà l’essence ou les sens. J'aurai ainsi réécrit la légende mais l'histoire condamne à la réécriture sans fin d'un même texte dont le sens s’est oublié depuis avant même la première fois. Toujours est-il, je continue cette histoire pieuse et même épieuse : Contrairement aux attentes de Maximin, Catherine réussit à rendre fous les hommes de soi-disant science aux ordres comme toujours du pouvoir gris. Sans même recourir à la ciguë, elle se contenta peut-être d'en appeler à leur conscience, mais là je ne sais pas comment elle s'en est tirée : peut-être a-t-elle fait comme Jeanne d'Arc ou Antigone, c'est-à-dire invoqué des lois non écrites inconnues même des hommes de loi. Au Moyen Âge, Sainte-Catherine était rangée parmi les 14 seins les plus utiles au ciel ; certains voient en elle l’ange qui apparut à Jeanne, mais c’est une vision sans plus de fondement que celle qui en fait l’âme damnée de Gilles de Rais. La vérité est qu’elle ruine tous les bourreaux du bon sens sur un bûcher, elle est la Rouée qui aura fait éclater la roue au moment où son corps pantelant y avait été déposé, devenant plus tard l’enseigne des Décolletés. Son secret tenait en ce corps même : son Toucher parlait plus fort que tout autre argument. Par une ironie du sort, elle devint donc l’ange gardienne des philosophes et autres hommes de parole qu’elle avait rendus muets, destin anticipant sa décapitation finale ou pas tout à fait finale puisque le corps tronçonné mystérieusement réapparut intact et momifié dans les règles de l’art du désastre cinq siècles plus tard au sommet de la montagne dite de Moïse, très exactement au lieu-dit où Dieu aurait aveuglé le même Moïse têtu comme une mule sous la forme d'un buisson ardent qu'on montre encore aujourd'hui à l'intérieur du monastère Sainte-Catherine qui contient d'ailleurs aussi une mosquée mais pas de synagogue. La légende dit que son corps avait été métaphorisé au mont Sinaï par des anges où par la suite fut construit un monastère sur l'ordre de l'empereur Justinien qui s’était donc converti au christianisme et avait entraîné l’empire avec lui.

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