Monday, July 27, 2009

La Démocratie est-elle une Idée universelle ?


La Démocratie est-elle une Idée universelle ?
Une Idée, oui, peut-être, si c’est au sens kantien de l’Idéal de la raison pure (encore faudrait-il pouvoir s’assurer de sa pureté), ce vers quoi l’on ne peut que « se » diriger : et en ce sens uni-versée plus encore qu’universelle : tournée vers l’Un — du même (« globe »), sans donc discriminations dues aux frontières, nationalités, ethnies, églises, etc. sans que tout cela, le merdier « social » puisse s’oublier ni disparaître du jour au lendemain : peut-être les Etats-Unis dans tous leurs états, soit hors d’état : faut-il encore des Etats ? Mais je me sais halluciner en plein jour, encore une fois. Je ne reproche pas à la Démocratie d’éveiller une Idée sublime mais bien sa réalité sordide : on ne fait que compter les voix sans jamais chercher à les entendre. Seule la voix, toujours unique et mienne comme le Dasein, fait la différence ; toutes les autres distinctions sont remplaçables comme pratiquement toutes les pièces du corps humain. Un blanc peut avoir un cœur de femme noire, et ce cœur continuer à battre pour le même « un » qui n’est ni noir ni blanc… L’Europe ne fait plus cap nulle part : c’est une épave échouée et bientôt destinée à devenir un gigantesque musée sponsorisé par les Chinois reconvertis dans l’exploitation des chinoiseries occidentales… même si les Mandarins ont fini par tous passer l’arme à gauche et, plus souvent, à droite. Le fait est saisissant : ce n’est plus même une affaire de décalage entre continents.
OBAMA sonne un peu comme KAMUNGO, nom en dialecte « amazonien » d’un oiseau bizarre, haut sur pattes mais pataud de plumes, venu déposer au milieu de quelque bourbier ses œufs solitaires tout en émettant un son culminant en gargouillis incongrus, borborygmes dirait Nancy… Je parle d’une analogie dans la dynamique des noms : j’aime qu’Obama vienne du Kenya, qu’il africanise un peu l’Amérique… à l’inverse des Français qui s’américanisent sans même s’en rendre compte, comme des autruches malotrues. Après tout (et il y aura un après à tout), la forêt est notre seul avenir sur cette planète dévastée.
(Ce poste a été écrit avant l'élection d'Obama; il remplace celui sur l'affaire Gates, du nom de ce professeur Noir de Harvard qui s'est fait STUPIDEMENT arrêter par la police--blanche--pour avoir osé lui "répondre" après avoir prouvé qu'il était bien chez lui; des voisins, encore eux la plaie, avaient cru à un cambriolage et appelé 911. L'affaire n'est pas tout à fait finie, mais a prouvé une fois de plus qu'il existe encore, même maintenant, un préjugé fatal, enraciné profondément dans l'histoire de ce pays construit sur l'esclavage, lui-même d'origine européenne comme la colonisation et la phallologocentrie à la Berlusconi-Sarkozizi...)

Thursday, July 23, 2009

au pays des cous rouges

Il n’y a toujours pas de palissade. Les deux cous rouges d’en face sont sortis biduler, machiner quelque truc machin-chose dans leur bazar de poubelle pas belle, tout en échangeant des sons rocailleux vociférés, glougloutant comme des dindons mélangés de paons. L’observateur, individu tout de noir vêtu, croise les jambes assis tranquillement sur un siège lui aussi noir mais d’un noir passé, cendreux ; il a posé dans l’herbe l’arme du crime, déjà à demi rongée. Il a besoin de ses deux mains pour se prendre la tête à la vue du néant contondant qui semble lui couper le sifflet.

N.d.T. Il faudrait plutôt dire 'nuques rouges' mais le mot 'nuques' me fait aussitôt penser aux eunuques; or je ne veux pas en rajouter sur mes voisins, love your neighbor, nos prochains pas tellement pro-chiens, les leurs restant attachés jour & nuit à aboyer, et même hurler à la mort à chaque sirène de police...

Wednesday, July 8, 2009

voir sa terre ou mourir


Plat sillage

Voir sa terre ou mourir je ne sais pas si je dois rendre compte de tant d’heures agitées au travers des rues luisantes et désertes, mais essayons voir : rien que pour ? Qu’ai-je à rire, non, elle ne veut pas dire « dire » tout court, je suis donc rentré chez moi mais c’est comme si quelqu’un d’autre était à ma place et je me demande maintenant que c’est l’heure du compte rendu : dis-moi qu’as-tu vu chez toi ? Tout était paralysé, pareil à soi-même car là-bas rien ne change et pourtant il ne reste rien ou si peu de ce pays qui fut bien le mien. Oui, je pense au crime dont mon pays s’est fait complice, c’est fait de quoi ou de qui un pays ? Il y a l’île, les lieux inhabités, un quartier où je n’avais jamais habité et pourtant cela ne faisait aucune différence : j’avais déjà été là, la boulangerie avait toujours été là, au pas de la porte, on y achetait les mêmes croissants, parfois des chaussons aux pommes et puis il y a les éclairs, les éclairs au café naturellement. L’éclair me dure, avais-je lu durer la durée d’un éclair en général et pas une minute de plus, un ange en un éclair : c’est pour ça que le gâteau s’appelle comme ça juste pour me dire, ou pour rire : rendez-vous compte décidément voir sa terre ou mourir, ça fait du pareil au même.
novembre 2007

Tuesday, July 7, 2009

la faim abstraite


7 mars 2009
La faim : « abstrait », écrit une de mes étudiantes, elle nullement abstraite, hélas !
Suis-je comme Arthur trop terre à terre ? mais à quelle terre, maintenant, ici et maintenant : dévastée… Alors comment ai-je pu avoir l’envie furieuse de démolir à coups de pioche tous les murs de la maison — notre seul Refuge ? à cause de l’odeur de vernis dans mon bureau.
(J’écris dehors — 4 bougies, que j’ai prises reflétées dans l’arbre à découvert puisque les stores sont déposés — pour en remettre des neufs, en tissu japonais et non en plastique — intention plus qu’honorable mais l’enfer en est pavé.)
Et maintenant j’ai une faim non abstraite — peut-être est-ce tout ce qu’il me reste : alors la garder jalousement bien serrée au ventre, qu’elle ne s’échappe pas en me laissant démuni de tout.

Le gruau d'Héraclite contre la Crise

Gruau n.m. (1390 ; gruel XIIe ; frq grût)
1. Grain d’avoine, privé de son. Plat à base de gruau.
2. Fine fleur de froment.

Il existe deux versions de la même « anecdote », l’une, brève, due à Plutarque dans son traité « Du bavardage », l’autre, plus longue et également plus tardive, de Thémistius, philosophe péripatécien qui vécut au IVème siècle après J.-C. Plus moralisante, cette dernière a l’avantage de restituer le contexte historique : Ephèse, où vécut toute sa vie Héraclite (pas toujours reclus dans le Temple d’Artémis la Vierge farouche), était alors assiégée par les troupes perses… Or « les Ephésiens étaient habitués à vivre dans l’abondance et le plaisir. » Le siège ne leur fit pas changer de mode de vie et « ils n’en continuèrent pas moins à se divertir comme de coutume. Mais les provisions commencèrent de faire défaut dans la cité et, quand la faim se fit durement ressentir, les habitants se réunirent discuter voir ce que l’on pourrait faire pour remédier à la pénurie ; personne cependant n’osa proposer de mettre un frein à leur train de vie. Lorsqu’ils furent tous réunis, un homme nommé Héraclite prit du gruau d’orge, y mêla de l’eau et le mangea en restant assis parmi eux ; cela fut une leçon silencieuse donnée à tout le peuple. » Grâce au gruau d’Héraclite, conclut le narrateur, les Perses replièrent bagages, ayant compris qu’ils ne pouvaient vaincre des hommes qui savaient se contenter de ce qu’il y a, ainsi que disait déjà Plutarque qui présente la scène de manière plus philosophique : le geste d’Héraclite est bien plus parlant que tout un discours, dit-il en écho à Heidegger pour qui seul peut parler celui qui sait se taire. Une autre anecdote, rapportée cette fois par Diogène Laërce, dit que qu’un débateur ayant demandé à Héraclite pourquoi il gardait le silence, il répondit : « c’est pour te faire parler, âne bâté ! » Mais la leçon reste d’abord politique (comme toute la pensée d’Héraclite). Le même Diogène Laërce cite une pseudo-lettre du « roi Darius, fils d’Hystape » aurait adressée « au philosophe Héraclite d’Ephèse », où il l’invite à sa Cour pour « être initié par toi à la science des Grecs ». Il lui fait même valoir que nul n’est prophète en son pays et que « les Grecs en général n’accordent pas aux savants toute l’estime qu’ils méritent ». Mais ces flatteries n’ont aucun effet : « Tous les hommes aujourd’hui s’écartent de la vérité et de la justice » : tous, Grecs et non-Grecs, ne sont assoiffés que de ce qui ne cesse de les altérer, pouvoir et honneurs. « Quant à moi, je me contente d’un rien et je vis à ma fantaisie. »