Saturday, December 1, 2012

Le vide d’un maintenant sans durée



« Dans la soi-disant éternité ne se cache qu’un périssable gardé en conserve, mis au rancart dans le vide d’un maintenant sans durée. »
Martin Heidegger, « Pourquoi des poètes ? », in Chemins qui ne mènent nulle part.

Heidegger avait-il raison en donnant « la mort » pour l'avenir, soit la première des trois extases ? Ou bien y a-t-il un tout autre sens à l'avenir que ce mot de m… ? La temporalité de l’existence n’est pas naturelle puisque la mort ne l'est pas, sur ce point Heidegger diffère radicalement des Grecs. Parce que les Grecs prenaient la mesure du temps selon l’Etre comme constante présence. Cela ne fait pas de la mortalité un accident davantage, l'accident supposant une substance. Il y a pourtant une forme de maturation. La possibilité, écrit-il, de l'impossibilité grossit comme si on était « enceint » mais pas d’un saint, la conception du Dasein n’étant justement pas immaculée ; car les mortels touchent de plus près à l’Abîme : l'ab-solu ou l’absence de sol comme seul sol. En cela les mortels s’aventurent plus loin que les Immortels qui ne peuvent jamais cesser de l’être, et ont donc encore besoin de l’être. Schelling avait raison : la liberté humaine repose sur cet abîme. Toucher à ce sol intouchable : le Là-même, si intimement qu’il n'y a personne qui puisse rien nous apprendre à son « sujet » ; en tout cas, il ne s'agit jamais, à aucun moment, d’une autre vie après. L'expérience fait l’impossible différence avec ou sans a (avec ce sera encore s[ ]ns), ou de l'impossibilité de la fixer ; non pas l’impermanence car le flux abrite l'éternité, celle du feu toujours (aei) vivant, « toujours » ne signifiant pas d'abord « sans cesse » (car on présuppose alors la continuité) ; donc continuité & discontinuité conjuguées en un partage à mesure, et cette mesure, c'est le Temps qui la configure, à chaque fois différemment. Flux sans hiérarchie, interpénétration sans obstruction : un-tout comme tout-un.

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