Wednesday, September 25, 2013

Toujours nos vieux démons



Déconstruction : Une opération sans douleur, mais aussi sans grande valeur. La « déconstruction » n’a jamais pris corps nulle part ; ou alors, comme des parasites se greffent sur un hôte, qui devait à la vérité d'être déjà tout pourri : la Métaphysique a eu droit à une mort en douceur, au moins. 
Sur un vieux carnet rempli des notes prises à écouter Derrida parler du secret pendant des heures et des heures, je suis tombé sur ces mots (les premiers du séminaire) qui se donnaient comme un commentaire de l’appel (ou cri) de la « conscience » (cette instance souveraine sans laquelle il n’est pas de science digne de ce nom) tel qu’il fait irruption au début de la seconde section d’Etre & Temps : « l’autre me regarde ». L’autre ? Quel autre ? Et de quel droit peut-il donc me regarder ? Moi – après tout c’est bien moi et moi seul que cela regarde – je n’aime pas du tout être regardé, quand je dors, par exemple, ou quand je vais « là où le roi va tout seul », et même quand je mange. L’autre est une « ruse de la raison », une invention du même pour se tenir compagnie – nous devrions le reconnaître une fois pour toutes, il n’y a que le même à pouvoir se transformer en une infinité d’ « autres ». Ce qui veut aussi dire qu’il n’y a pas d’autre au singulier, avec ou sans majuscule divine. Comme substantif, « autre » ne devrait s’employer qu’au pluriel – sinon il occupe la place de Dieu… ou du Jugement Dernier. La conscience n’appelle à aucun grand Autre – elle ramène à soi, « comme » la voix de l’ami [neutre] en soi. L’ami n’est jamais « l’autre », autrement tous les autres seraient nos amis. L’ami n’est même pas quelqu’un, homme ou femme. Plus loin, Derrida développait la « structure du secret » sous la forme d’un double « qui » et « quoi » : a) ce que je ne partage pas ; b) ce qui me partage. Cela, Héraclite l’appelle « démon », et ne saurait se traduire par « l’autre ». « Autre » viendra toujours après – mais pas après « moi » qui ne suis à mon tour qu’un autre au regard du « démon » qui me partage sans que je puisse le partager (à volonté). Il fait le partage – en « moi » - entre ce qui est propre (non partageable) et ce qui est commun.   



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