Sunday, November 25, 2012
Saturday, November 24, 2012
Fabuleuse fable
"Il était une fois un pays dans lequel il n'y avait guère que des fous,
hors quelques-uns qui étaient sages. Ceux-ci surent, grâce à leur
sagesse, qu'il allait tomber une grande pluie qui rendrait fou quiconque
en serait mouillé ou souillé. Ce que sachant, ils se firent des
cavernes sous terre, jusqu'à ce que la pluie eût cessé. Puis ils
sortirent, pensant faire faire aux autres tout ce qu'ils voudraient et
les gouverner à leur guise. Mais les fous ne voulurent rien entendre,
prétendant se gouverner eux-mêmes et se passer de l'aide des sages.
Quand ceux-ci virent qu'ils ne pouvaient parvenir à leurs fins, ils
regrettèrent de n'être pas restés sous la pluie et de n'avoir pas
souillé leurs vêtements comme les autres."
Thomas More, Ecrits de prison
Thomas More, Ecrits de prison
Wednesday, November 21, 2012
Un dernier vers pour la route
les images dont se nourrit l’esprit
sont lettres mortes pour des illettrés
à lire ces choses sur des archets violents
l’espace comme une porte rouillée
prête à sortir de ses gonds
au moindre coup s'élance
Sunday, November 18, 2012
Schelling : « L’entendement est de la folie réglée. »
Les
philosophes sont-ils donc les seuls détenteurs du secret de la vérité :
qu’elle vienne de la liberté (de l’Etre) ? Ils voient comment toute chose
est disposée, ce qu’il faut qu’elle soit pour qu’elle fasse partie d’un tout.
Mais ils ne détiennent rien : la vérité ne peut être détenue, comme un
détenu en prison, même en le mot (forcément trompeur) de « vérité »,
et même si l’on corrige l’erreur de la traduction en latin du mot grec aletheia
grâce à une étymologie inconnue des gens qui parlaient la langue communément
appelée « grecque ». Platon préférait inventer une « erreur
divine » à l’origine de la vérité, où il faut comprendre peut-être que
c’est la vérité « elle-même » qui est une invention « invraisemblable ».
Dans tous les cas, le secret reste bien gardé dans le mot même qui en devient
inoubliable, alors qu’en toute rigueur il n’y a rien – absolument rien – qui ne
soit voué à l’oubli à plus ou moins brève échéance. Une génération suffit en
général à tout reléguer dans les oubliettes de « l’histoire ». Mais
c’est justement parce qu’il n’y a apriori rien qui puisse s’oublier que le vrai ne peut
pas, lui et lui seul, échapper à qui l’a reconnu au moins une fois. « Par
exemple » la mort. C’est peut-être même le seul exemple absolument vrai et
en même temps totalement indémontrable puisqu’elle échappe à tout
apparaître. Le mort peut bien avoir telle ou telle apparence, la (sa) mort n’en
aura jamais offert une seule. Elle ne donne à voir que la soustraction de tout,
y compris de la vue. C’est cela qui casse toute continuité, forcément
illusoire, pleine de trous, des discours ; la mort reste toujours aussi
incroyable, et incroyablement vraie. Il n’y a plus la moindre image ni
métaphore, plus rien à voir avec l’imposture ou la littérature.
Friday, November 16, 2012
Ni ordre ni beauté
Héraclite dit donc que le plus bel ordre
(au sens de la disposition des choses dans un ensemble où chaque chose a sa
place attribuée en fonction d’une certaine logique) est fait de choses
« versées », voire déversées au hasard, n’importe comment. Ce qui
veut dire ?
1. que l’ordre
n’importe pas ;
2. que la
beauté se passe d’ordre ;
3. que l’ordre
n’a pas besoin d’être beau ;
4. que la
beauté n’importe pas non plus ?
Ni ordre ni beauté, ce serait cela, le
cosmos ? La plus belle cosmétique, le plus bel arrangement, la plus belle
parure, décoration : on verse des paillettes, répand des fards, maquille –
alors qu’il faut juste laisser tout tel. C’est encore comme ça que c’est le
plus beau : vrai. Ne rien
arranger, jamais. Pas d’arrangements,
pas de compromis, parce que rien ne s’arrange jamais, « avec »
l’existence ; tout arrangement produit des dérangements qui le mettent
vite en déroute. Les deux dangers qui menacent le monde selon Valéry – ordre
& désordre – ne sont en réalité pas deux (l’ensemble ne fait jamais qu’un)
et ne sont donc pas des dangers « réels » (comme s’il pouvait y avoir
un monde en ordre et un autre en désordre, comme si ce n’était pas toujours le
même monde, en ordre comme en désordre). La disposition est toujours aléatoire
ou précaire, tout le temps qu’elle tient ; c’est donc sa durée seule qui fait
sa force. Or les structures les plus durables sont immatérielles. Seulement, ce
langage des structures n’est valable que pour les institutions, jamais pour l’existant
qui n’est donc pas « structuré ». C’est ce qui condamne à l’avance
son analytique à n’être qu’une destruction préalable de toutes les structures
mises en place par l’ontologie de la substance (dérivée indument d’Aristote qui
avait en vue plutôt une éthique existentiale).
Monday, November 12, 2012
votre Dasein doit rester hors-service
Heidegger écrit en
langage clair ; on ne peut pas confondre son Dasein avec un chien ou un
outil ou même un Dieu. Le Dasein in situ unique en son genre consiste à
dépasser tout genre et ainsi ne peut pas davantage se réduire au genre humain du fait aussi que Dasein évite aussi toute généralité et
génération, ce qui explique qu’il ne puisse donc pas plus dégénérer que se
régénérer. Pourquoi, feint alors de s’étonner Heidegger, au paragraphe 82 avec la
note sur l'éternité qui obligerait à penser une temporalité originaire et infinie, pourquoi dit-on le temps passe et non pas le temps naît, sinon qu'on suit le sens du
temps de passage orienté depuis l'avenir vers le passé ? Ne serait-il pas
possible de lire le "sens" du temps à l'envers ? Réponse de
Heidegger : l'avenir, c'est la fin, c'est la mort. Le Dasein est orienté vers l'avenir en ce sens qu'il le projette comme l'horizon déterminant
ce qu'il faut et ce qu'il reste à faire & parfaire. Du coup si par hasard tous les buts venaient à être réalisés de sorte qu'il ne reste plus aucun programme à exécuter ? La
perfection (du nihilisme-technique) s'abolit elle-même dans sa béatitude éternelle ; à témoigner (déposer) de
l'impossibilité de transformer le Dasein en une occupation, une activité ou un commerce. Même s'il n'y a personne d’humain ou de divin, Dasein reste là à veiller. Complètement inutile et à jamais hors-service.
Sunday, November 11, 2012
exister sans objet
Exister est sans objet ? Tant mieux : même
s’il y en avait eu un, il n’aurait pas fait long feu. Pas davantage n’y a-t-il de
nouveau « sujet » (l’homme « régénéré » ou
« libéré » ou « responsable »); exister ne se produit
pas, ni en série ni en masse ; « deviens celui-là, que tu
es ! » signifie que l’être ne suffit pas, il faut encore le
devenir ; devenir l’être car seul l’être peut devenir. Suis-je en train de remplir « mon »
temps ? Mais si je n’écrivais rien, il ne serait ni plus ni moins rempli. Il
n’y a aucune vertu à l’écriture. Derrida nous a bernés. Sa différance avec un a
est une abstraction qui n’ajoute rien que la confusion à la notion de
« différence » : si simple soit-elle, elle est toujours, en tant
que différence, difficile à penser comme
telle. Je soupçonne Derrida d’avoir voulu surclasser Heidegger et sa différence ontologique. L’emploi du verbe
« différer » au sens d’ajourner n’existe qu’en français, alors que la
différance se veut une structure d’archi-généralité puisqu’elle commande
jusqu’à l’être et le temps ! Enfin, c’est l’excuse idéale pour ne rien
faire. De fait, y a-t-il eu jamais qui que ce soit à qui la différance ait
jamais rien fait ? Qui ait eu sa façon de penser (et donc son existence)
transformée (rendue différente) par une graphie même non orthodoxe et « inventive »
?
Livre de bouillon, § 44.
Il n'y a d'avenir que sans
… le Voyou qui s’est introduit
entre « nous ». Dans tout cela, on pourrait facilement m’accuser
d’avoir tout mélangé, et surtout pas respecté la sacro-sainte frontière
privé/public – qui l’a fixée ? et qui est capable de dire exactement où
elle passe, quand Internet pénètre partout ? Quand un
« philosophe » fait de ses amours avec une femme « réelle »
(mais pas la « sienne » dans la même réalité), avec qui il a même un
fils qu’il n’ose même pas reconnaître (de peur de ternir sa belle
réputation ? quel philosophe s’en est jamais soucié ?) un livre
sérieux de « philosophie » qui va, dit le titre, « de
Platon à Freud et au-delà », tout le monde crie au génie ! Moi, j’ai
trouvé le livre « à chier », dirait Artaud. Au contraire de son
« glas » que je continue de lire à cause de Genet qui fait si bien la
paire avec Hegel. Mais la question qui figure sous le titre, « Que
restera-t-il du savoir absolu ? » appelle inévitablement cette autre
plus critique encore : « Que restera-t-il de la
déconstruction ? » La réponse ne peut que sonner brutale : pas
même de belles ruines ! Et pour un penseur de la « trace »,
c’est tout de même un peu vexant. J’aimerais plutôt effacer toutes mes traces,
que nul ne s’avise de me suivre : à coup sûr je n’aurai pu le mener qu’à
se perdre. Si je ne sais pas moi-même où je me « dirige »… Dans tous
les cas, rien ne se transmet du chemin à prendre, le seul qui puisse nous
aider, c’est justement celui qui cache son jeu si bien qu’il a en effet l’air
d’un « chemin qui ne mène nulle part ». Autrement dit, celui qui ne se montre pas.
Penser, c’est anticiper & même « deviner » ce qui ne se montre
pas mais qui, ce faisant, activement donc, montre vers où il faut chercher,
c’est-à-dire d’abord d’où il faut se détourner. L’un ne va pas sans l’autre, il
n’y a d’avenir que sans.
Livre de bouillon, § 40, 2011.
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